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Il y a parti à prendre, partout, sur tout. Il y a avis à donner, opinion à dire, tripes à mettre sur la table. Exprimer sa liberté.

METABOLISME, MONDIABOLISME

Dans le Figaro Economie de ce mardi 17 février, un papier d’Arnaud Rodier sur le plongeon de l’économie japonaise  cite un rapport de Peter Tasker, économiste chez Dresdner Kleinwort. Celui-ci assimile le Japon qui, après s’être relevé d’une redoutable crise de croissance dans les années 90, se voit touché comme peu d’autres par la tempête économique actuelle, à une « fourmi des temps modernes ».

« La fourmi a refusé de tirer les bénéfices de son dur labeur. A la place, elle s’est spécialisée dans la fabrication d’aliments pour cigales. Non seulement elle les livrait à son irresponsable amie (les Etats-Unis, c’est moi qui le précise) mais en plus, elle lui prêtait l’argent pour les acheter… Maintenant que l’hiver est arrivé et que la cigale a arrêté de chanter, la fourmi ne sait que faire de cette nourriture indigeste pour elle. » C’est le mot : indigeste. Depuis longtemps, je suis convaincu que les peuples, les nations, les états, ont chacun un métabolisme qui leur est propre, bon ou mauvais. Et que la mondialisation, c’est la guerre mondiale des métabolismes. Une histoire de nutriments, d’enzymes, de sucs digestifs. Une histoire d’organismes plus ou moins adaptés aux changements de régime, de cultures, d’influences. D’occidental se gavant d’épices, d’oriental se bâfrant de graisse.


En l’occurrence, le Japon s’est abîmé en installant une sorte de cordon vital à haut débit avec les Etats-Unis. Même si,  chez lui, c’est caricatural, il n’est pas le seul. Regardez la Chine : la conversion de ses élites obnubilées par le profit, sans aucun garde-fou,  branchées sur la frénésie électroménagère, entraîne des fractures aux conséquences sociales et humaines insoupçonnées.  Le Japon, donc, subit de plein fouet le dérèglement métabolique de l’Amérique, son incapacité à réguler ses flux, à absorber ses montées en puissance, à satisfaire ses besoins.  Son incapacité à comprendre comment on se nourrit de son environnement, comment on est en échange avec lui.  L’organisme américain est cloisonné, paradoxalement, par le libéralisme. Chacun pour soi, chacun de son côté, on échafaude, on développe. On hypertrophie, on fuit en avant. On se sectionne, se sectarise au nom d’une liberté qui se révèle enfermante.  Sans vision collective autre que le dogme partagé d’un rêve américain qui tourne au cauchemar, que l’amour respectable de la bannière étoilée, foulée au pied par les peuples frustrés. L'exceptionnelle capacité assimilatrice, transformatrice en énergie et en envie, du melting-pot semble évanouie.

Avoir laissé l’économie mondiale à la merci de l’avidité égoïste des post-adolescents  autistes des salles de marché, avoir construit des systèmes aussi complexes qu’immoraux (titriser le malheur des gens !), tout cela au nom de la croyance en un grand régulateur, c’est criminel, et surtout, c’est stupide.

Ce qui est terrible, sans être méchant, enfin, si, en étant méchant, c’est que ce dérèglement se voit, physiquement : ils sont gros, gras (2 adultes sur 3 sont obèses, le diabète est explosif). Ils absorbent mal, ils n’éliminent plus. Il y a une forme de cohérence absolue entre le dérèglement du  corps de l’Américain et le dérèglement du corps de l’Amérique. Ils se suicident. Et poussent au suicide.


Le règlement de la crise de foi, sans jeu de mots, que nous vivons, c’est la remise à plat des fonctionnements, c’est la recherche de nouvelles façons de vivre ensemble. De transformer les flux vicieux, en flux sinon vertueux au moins inoffensifs voire enrichissants, roboratifs. C’est aussi, probablement, lutter contre une uniformisation des comportements, contre la réductions à une seule des façons de penser, de boire, de manger, de  jouir, de rire, de travailler, de parler.


Dans ce registre, je pense à notre French Paradox, comme régime alimentaire d’abord, celui qui garde en si bonne santé, même si l’on ne se prive pas de graisse,  ni d’un verre de vin : une histoire d’équilibre, de système immunitaire, de vision d’ensemble.  De philosophie de la vie. Je pense ensuite  au French Paradox de notre organisation économique et sociale : que n’a-t-on entendu, de la part de nos chers amis anglo-saxons avant que la bourrasque n’arrive, sur l’inadaptation du système français! Alors que je ne peux être accusé de bienveillance pour nos arriérations (cf mon dernier post) et notre incapacité à réformer, je ne peux que constater que le métabolisme français est plutôt beaucoup plus sain. Grâce à son niveau de protection, à l’idée plus partagée de ce que nous sommes en tant que corps vivant, grâce à son niveau de régulation, qui se concrétise dans une culture capitaliste spécifique (le colbertisme, finalement, qui oriente les énergies). La relative solidité des banques françaises (je touche du bois, mais les résultats sont là) traduit cette vision.

Mais jusqu’à quand se retrancher derrière cette ligne Maginot ? Parler du métabolisme français, dans la mondiabolisation,  c’est angélique ou plus sérieusement, saugrenu. On peut simplement essayer de contribuer, de faire entendre sa voix. A condition de croire un peu en soi, en sa mission dans le monde, en la force de ses idées.

Ah j’oubliais le principal : le Dr Obama est arrivé. Vous pouvez donc oublier tout ce que je viens de vous dire. On est sauvé. Mon prochain post : peut-être « Unanimisme et animisme »… Qu’est ce que je ne vais pas entendre !

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A
bonjour VincentTout de même votre pensée est sur le fil d'un rasoir... et parfois... il frôle le bord de gouffres où l'on n'a pas vraiment envie de vous suivre. Les lieux obscurs de toute pensée (libre ?), où l'on va le plus souvent seul avec soi-même si seulement on en a la tentation...Mais vous êtes assez formidable pour créer des systèmes ! Votre métaphore du gras est à la limite du sophisme ! Non ? Pauvres amerloques quand même ! Que dire alors des malheureux du Darfour ? Qu'avez-vous à dire de leur métabolisme ?Quant au Dr. Obama, pourquoi décrier son statut un peu messianique, si le monde a besoin d'un messie ? de Gaulle en son temps a rempli ce rôle, ce vide, a porté cet espoir, et par deux fois ! Je ne vois pas là matière à ironiser si ce n'est sur la misère de nos civilisations ! Pleurer sur la profondeur d'une crise qui est bien plus qu'économique...J'écoutais hier une formidable émission scientifique sur France Culture (dont je n'ai pas compris le quart, mais, bon, par capilarité...) sur la notion de l'Universel ; avec un philosophe, un physicien, un anthropologue. Quelle belle notion à brandir face au monstre de la mondialisation ! Une anecdote qui fait réfléchir : le physicien (je crois...) racontait qu'il était, pour je ne sais quel organisme, habilité à proposer à des africains de participer à des études cliniques pour le développement de médicaments contre le sida. Pour ces études, vous savez qu'il faut recueillir ce qu'on appelle le "consentement éclairé" du patient avant de l'intégrer dans l'étude. Consentement personnel, écrit, signé, bien à l'occidentale des Droits de l'Homme. Sauf que, dans certains pays, cela ne veut rien dire ! Le consentement éclairé ne saurait être individuel, mais collectif, familial, tribal. Et puis, écrit. Oui mais, si l'on demande d'écrire, n'est pas parce qu'on met ma parole en doute ? Comme c'est intéressant et comme cela remet en question notre façon ethnocentrée de voir le monde. mondialisé ? quel crime contre la belle diversité. Universel ? Là oui. à nous de continuer à en chercher les codes...Pour finir aujoud'hui, je ne veux pas faire de morale, mais quand même, globalement, vous êtes "contre"...
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V
<br /> Chère Agapanthe (tiens, ça me fait penser à l'Ile d'Yeu au printemps; tiens, ça tombe bien, j'y pars demain), j'aime bien vos commentaires : ils sont dans l'esprit de ce blog. Oui je sais, les<br /> sophismes, on m'a déjà dit ça. Rhéteur, un peu! Bretteur, beaucoup. L'envie de se battre,  pour des idées, non pas dans les gouffres mais au soleil, et refuser la chape de plomb du<br /> prêt-à-penser et surtout du prêt-à-parler. Vous savez, cette métaphore du métabolisme et du gras qui vous paraît me faire cotoyer les abîmes, elle ne m'est pas dictée par de<br /> l'antiaméricanisme, mais par un refus d'une uniformisation imbécile, qui va contre la raison, qui nous décolle de notre culture, de notre façon d'être les deux pieds plantés dans ce qui suffit<br /> de terre. De ce que nous sommes, au fond. Ce n'est pas pur sophisme. Quand je vois le mal de l'obésité traverser l'Atlantique pour toucher non pas la crème, mais les plus pauvres, les moins<br /> éduqués, les moins enracinés, les plus fragiles, je me dis qu'on a un peu le droit de se battre pour les victimes les plus innocentes de cette sous-culture. De cette barbarie. Avec nos armes,<br /> fussent-elles "bien de chez nous". Et d'un autre côté, vous le notez, il y a ces millions de gens, totalement oubliés, protégés bien malgré eux des excès, mais dont les cultures s'étiolent,<br /> s'éteignent, comme eux, brindilles brûlées. Permettez moi de stigmatiser tout ça! Et de stigmatiser aussi cette vision de riches que l'on a de tout : du réchauffement climatique, des OGM, des<br /> droits humains. Cet horrible fatras, ce système de fausses valeurs inventé par le marché. Comme si tout le temps que nous avons mis à devenir gros (2000 ans ?), il fallait en priver les autres...<br /> Pour que les affaires marchent ! Mondiabolisme, je vous dis! Mais vous allez voir : je suis aussi "pour" des tas de trucs...<br /> <br /> <br />
T
J e ne suis pas certain que l'exemple américain soit le pire et, surtout, toujours celui qui déclenche. Si nous allions voir pourquoi nos amis anglais sont si discrets en ce moment. Eux qui étaient si prompts à donner des leçons de civilisation. A commencer par les Français. Quand je pense que les Gallois, représentants d'une toute petite province britannique, est la meilleure équipe de rugby d'Europe ! Shame on you English bastards. 5358 signes pour cette contribution contre 7394 pour la première. Il y a du progrès. A 3000, ce sera encore plus lisible mon Lulu. 
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V
<br /> L'idée n'est pas de faire de l'antiaméricanisme primaire, mon Pipo; mais de parler des problèmes de métabolisme. Le poids du Royaume Uni n'est plus assez grand pour que les échanges avec les<br /> Britanniques aient un vrai impact sur le reste du monde. Sauf, on le voit, en ce moment, sur le plan financier. Ils sont en fait comme un 51 état américain. Mais juste un état...<br /> <br /> <br />
E
je te posterai un commentaire prochainement... juste une chose : quand tu cites un article, c'est bien d'insérer un lien, comme ça on peut aller aussi lire le papier en question. enfin, juste une idée... à bientôt
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