Il y a parti à prendre, partout, sur tout. Il y a avis à donner, opinion à dire, tripes à mettre sur la table. Exprimer sa liberté.
Mes amis sur Facebook ont pu, vendredi dernier, découvrir la facétie détournante que m’a adressée mon ami Grégoire de Gaulle, graphiste et photographe de grand talent (allez voir son travail ici).
Comme j’avais allumé dans mon article précédent un Delon un peu Kryspant, Grégoire a eu l'idée de cette autre adaptation de la pub de la chaîne d’optique.
Résultat : au delà d'un questionnement sur la qualité de vision du candidat, je crois que c’est toute la campagne de François Hollande qui est résumée dans ce visuel. Il y a la posture, la volonté de se transformer, de littéralement se transfigurer , d’être un autre pour devenir cet homme dont le destin rencontre le peuple et se confond pour un temps avec l'histoire de France, comme le suppose l’élection du président de la République au suffrage universel. Mais le regard est inquiet, intranquille, l’air de ne plus être qui on est vraiment. Une épaisseur disparue. L'envie d'être tellement un autre que Madame Michu se demande qui croire : celui-ci, ou celui d’avant.
« Avant, il était François Hollande ». Comme pour Delon, l’application de la formule au candidat socialiste est saisissante. On aurait envie d’ajouter, « Avant, il était le François Hollande ». Le vrai. Vous savez, ce monsieur tout en rondeur, gourmand au propre et au figuré, exceptionnellement talentueux pour le commentaire et la formule qui fait mouche. Un artiste politique qui vous marie, à coup de finesse et d’arguties, l’eau et le feu, et concilie les inconciliables courants d’un PS écartelé. Pour moi, un des esprits les plus vifs de la politique : le seul capable de se transformer en magnifique humoriste de stand up.
Il faut lire le bon récit de Dan Franck, dans Télérama du 4 janvier, qui raconte un voyage de Hollande, par le train, au Creusot et qui marque bien à quel point la mutation de Hollande est difficile, voire contre-nature. Il redeviendrait bien le bon copain blagueur et débonnaire des journalistes. Valls sans hésitation l'en empêche. Car voilà. "Il faut que le regard des autres change" dit Franck. "Il ne veut plus (que ses amis) lui parlent comme avant". Et, comble de la difficulté, il veut devenir un autre "qui serait à la fois lui-même avant et lui-même après". Peut-être le spécialiste des synthèses qu'il est y arrivera-t-il. Mais l'expérimentaton sur soi est toujours plus difficile que sur les autres.
Revenons pour finir à son adversaire. Sarkozy a eu beau maigrir, essayer de changer, d’apparaître différent (« endosser les habits présidentiels »), on sait que « le » Sarkozy est resté le même. Et s’il devait être réélu, ce ne sera pas pour sa transformation dont, je crois, n’ont rien à faire ses partisans, ou ceux dont les suffrages lui sont utiles.