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Il y a parti à prendre, partout, sur tout. Il y a avis à donner, opinion à dire, tripes à mettre sur la table. Exprimer sa liberté.

POMPE FUNNY, POMPE FUNESTE DANS LA PUB

 

 

Avertissement : D'habitude, quand je vous fais partager mes Qsc0013a68buartiers Libres ou mes Cartes Blanches publiés dans "Médias", je n'ai pas de problème d'illustration. En dehors de celles, magnifiques, en pleine page, de Philippe Lagautrière, il n'y en a pas. Et, en gros, même si je vous y invite, vous n'en apprenez pas plus en achetant la revue. Aujourd'hui, je suis bien embêté : mon papier s'étendant sur 4 pages, avec moult illustrations grand format impossibles à insérer sur ce blog frustre, je suis dans l'obligation de vous intimer l'ordre d'acheter "Médias" pour en avoir tout le sel et le spectacle. Sauf si, à la lecture de ce qui suit, ou si vous êtes publiphobe,  vous jugez que ça n'en vaut pas la peine... Sachez, pour vous mettre l'eau à la bouche, que ce papier s'insère dans un sujet intitulé "Le gang des pastiches court toujours", consacré au plagiat.

 

 

Il y avait longtemps que je voulais parler de Joe la Pompe dans Médias. Mais jamais le sommaire ne s’était prêté aussi bien que celui de ce numéro à ce déversement d’un peu de fiel sur le métier que je continue à faire avec tant de plaisir.  J’avais déjà réprouvé, ici, le panurgisme - masqué derrière la conviction d’être aux avant-postes de la tendance -  des publicitaires, ainsi que leur manque de fantaisie culturelle. Nous voilà au cœur du sujet. Il a fallu ce comité de rédaction qui consacrait un dossier au plagiat pour que je sortisse mon sujet.

 

Joe la Pompe est une institution de notre métier. Une sorte d’enfer – comme les monastères avaient, dans un recoin de bibliothèque, leur enfer peuplé d’incunables licencieux ou blasphématoires – où se côtoient pour les clercs de la pub les dangers, les péchés, la preuve de leurs turpitudes intellectuelles ou de la limite de leur génie. Une collection qu’on regarde du bout des yeux et qu’on referme vite, de peur de trouver, au détour d’un clic, la belle affiche que l’on vient de concevoir, mais dans sa version originale, c’est à dire créée il y a cinq ans par un confrère argentin ou suédois pour un concurrent de son client.  Joe habite ici : www.joelapompe.net. Peu importe qui est derrière lui (ne comptez pas sur moi pour vous dire que c’est un publicitaire français qui souhaite garder l’anonymat). Conçu comme un amusant défi en 1999, celui d’épingler les doublons malheureux, Joe la Pompe est devenu, par la magie et la vitalité d’internet, un exceptionnel musée de campagnes jumelles, voire triplées, classées par secteur d’activité, où la copie est qualifiée, par euphémisme, de « less original » (« moins originale »). La bonne camaraderie n’étant pas, comme vous le savez peut-être, la vertu cardinale du publicitaire, le flux de dénonciations aide considérablement le webmaster à alimenter sa chronique du temps qui passe, et repasse les plats.

 

Je m’apprêtais donc à vous faire une sorte de cours sur ce qui pouvait bien conduire un créatif d’agence à produire, comme les illustrations choisies le montrent, des campagnes dont le ressort, l’expression, le principe actif sont rigoureusement identiques à ceux utilisées, précédemment, par d’autres campagnes.

 

Or voici qu’en allant jusqu’aux FAQ du site, je me rends compte que j’étais sur le point de pomper Joe la Pompe.  J’allais vous dire «  que les idées que l’on croit originales ne le sont pas toujours »,  que l’on doit « mettre en lumière certaines pratiques douteuses du métier. Notamment la triche et le manque de culture publicitaire des acteurs du métier ». Je me serais hérissé en écrivant « que « la pompe » lorsqu’elle est avérée est un fléau, une triche, qui peut s’apparenter au dopage, au piratage, à la contrefaçon intellectuelle ». J’aurais ricané à l’idée de « tempérer les égos de certains créatifs qui se croient trop vite des génies. » et de stigmatiser, dans une communauté qui ne rêve que de décrocher des breloques, « ceux qui se glorifient de récompenses non méritées ».

 

Mais je me proposais aussi, pour défendre mes confrères, de chercher une explication à cette ahurissante entreprise de clonage. Or voici que je lis, dans ces mêmes FAQ, qu’ « une idée peut tout à fait naître dans deux cerveaux à 100 000 km (en copiant ça, j’aurais exagéré. Note de l’auteur), surtout quand l’homogénéisation des messages, mondialisation oblige, devient la règle. » J’aurais ajouté que, tellement le publicitaire est fait au moule, et donc aux pattes, « tout le monde utilise les mêmes recettes marketing, les mêmes outils, les mêmes références… ».

 

Bon, alors, qu’est ce que je vais bien pouvoir dire d’original ?

 

Que le créatif est un créateur sur commande, contraint par les attendus stratégiques de son client ou le brief de son patron, et qu’il a beaucoup plus d’excuses qu’un écrivain totalement  libre qui en contrefait un autre.

 

Que la qualité de réalisation des copies est souvent bien meilleure, l’équipe de création ayant probablement beaucoup plus de temps à consacrer à l’exécution…

JLP Livre

Que bien des publicitaires, moyennement jeunes, se copient eux-mêmes.  Je me demande si ce n’est pas pire de revendre deux fois la même idée à deux clients différents…

 

Que Joe la pompe existe aussi en livre. Et qu’il faut soutenir cette entreprise de salubrité  public…itaire. «  Nouveau ? Le meilleur de la production et reproduction publicitaire » (éditions Télémaque, préface d’un observateur incopiable, Christian Blachas) est disponible sur Amazon.

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B
<br /> Comme il a raison, Vincent, de raison garder devant les egos hypertrophies des divas factices du star system.<br /> <br /> <br /> Convaincues d'avoir un genie digne de Marcel Duchamp (celui de l'Urinoir, qui etait un vrai artiste) elles mettent en scene leur cuvette de WC en croyant qu'elles créeent une oeuvre. Les<br /> pauvres....<br /> <br /> <br /> Le monde publicitaire n'y echappe pas. Mais le monde politique, les intellectuels, etc. non plus.<br /> <br /> <br /> Ni le monde de ce que l'on appelle le "luxe".<br /> <br /> <br /> A propos d'intellectuels et de plagiat un amusant article sur un briquet, pas un Dupont mais le "briquet de Darwin"  <br /> <br /> <br /> http://archeologie-du-copier-coller.blogspot.com/2009/12/la-premiere-version-de-cet-article-ete.html<br />
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V
<br /> <br /> Merci Bruno pour ce commentaire.<br /> <br /> <br /> <br />